mardi 19 mars 2013

Les Sports canins (Chien magazine de mars 2013)


Faire du sport avec son chien


Envie de bouger avec votre chien ? De vous dépenser tout en vous amusant ? Du canicross au ski joëring, de nombreuses activités « nature » s’offrent à vous. Petit décryptage pour vous aider à faire votre choix...
 
 

Les différentes disciplines
Une petite dizaine de disciplines existent actuellement sur le « marché » des sports canins. Certaines sont anciennes, les autres beaucoup plus récentes. Toutes, ou presque, ont une version « loisir » et une version « compétition ». Canirando, canicross, bike ou ski joëring, trottinette, mushing : sous ces appellations « techniques » se cachent des sports tout-terrain ludiques, ouverts aux amateurs de grand air. Chacun optera pour celui qui convient à sa condition physique et à celle de son chien.

Le matériel

Il varie évidemment selon les disciplines. On retrouve néanmoins quelques dénominateurs communs : le chien, équipé d’un harnais adapté, est placé devant son conducteur, relié à lui par une longe élastique renforcée d’un amortisseur. Ainsi, le (ou les) chien(s) tracte(nt) l’être humain, lui permettant de gagner en vitesse ou de se déplacer quand les conditions météo rendent la plupart des excursions impossibles. Tous ces passe-temps, sans exception, vous permettront de vous évader, de vous aérer, de garder la forme et de renforcer le lien qui vous unit à votre compagnon.

Selon les saisons
 
En hiver.

Le mushing et le ski joëring
sont des disciplines hivernales, les plus anciennes, celles aussi dont découlent toutes les autres. Les mushers possèdent généralement des cheptels de chiens, souvent des nordiques, et considèrent l’attelage comme une véritable philosophie de vie. En revanche, pas besoin de meute pour s’adonner au ski joëring : un ou deux chiens suffisent. Dans les pays scandinaves, berceau du « skijo », il est d’usage depuis des millénaires de se déplacer à ski attelé à un cheval... ou à un chien, avatar plus récent mais tout aussi efficace.

Toute l’année.

Le canicross, lui, ne connaît pas les saisons. On peut ainsi le pratiquer quasiment toute l’année. Certaines compétitions sont d’ailleurs organisées en hiver en montagne, sur neige et sur verglas. Il en va de même pour le canirando*: peu importent les conditions météorologiques, si le tapis neigeux est trop abondant, les plus courageux chausseront leurs raquettes pour la balade.
Aux beaux jours.

Enfin, la trottinette, le bike joëring**, l’attelage hors neige (kart), voire le roller feront la joie des amoureux de plein air du printemps à l’automne. Il va de soi qu’avant de s’élancer sur les chemins et sentiers, on aura pris soin de se familiariser avec le véhicule choisi : on évitera ainsi le bike joëring si on ne se sent pas à l’aise sur un VTT... Car les vitesses atteintes par les sportifs grâce au chien sont parfois très impressionnantes, tout comme les éventuelles chutes !



Quel chien pour quelle discipline ?

Pour le canirando, n’importe quel chien, de n’importe quelle race, fait l’affaire ! Pas besoin de compétences spécifiques pour randonner le dimanche en famille et découvrir de nouveaux paysages. Une ceinture, une longe et un harnais, et en avant l’aventure !

Dans le monde du canicross, du ski joëring ou du bike joëring en revanche, les compétiteurs les plus acharnés privilégient les braques, parfois les setters, et certaines « races » créées spécifiquement pour le travail***, comme les greysters (croisements de braques et de lévriers greyhound) ou les alaskans (nés en Alsaka autour de critères de performance). Néanmoins, tous les chiens sont représentés sur les parcours ou dans les associations, du berger allemand au beagle, du petit bâtard au jack russell ou à l’american staffordshire.

Les mushers, eux, optent traditionnellement pour des races nordiques, huskies, malamutes, samoyèdes ou groenlandais, même si les braques, les greysters, et surtout les alaskans les remplacent avantageusement en attelage. Bien que l’alaskan soit  actuellement très fréquent dans les compétitions d’attelage à travers le monde, certaines fédérations exigent encore de leurs membres qu’ils optent pour une des quatre races nordiques reconnues par la Fédération cynologique internationale (FCI)****.

La santé du chien sportif

Quel que soit votre chien, et quelle que soit la discipline qui vous intéresse, un bilan vétérinaire préalable s’impose - cœur, poumons, hanches, coudes doivent notamment être contrôlés. Certaines morphologies canines étant moins adaptées que d’autres aux efforts soutenus, on veillera à respecter les aptitudes physiologiques de son compagnon à quatre pattes. On conseille également d’attendre que le chien ait fini sa croissance avant de l’atteler, ce qui n’empêche pas de lui apprendre les ordres de base au cours des promenades (droite, gauche, stop, etc). Et pour sortir en compétition, il devra être âgé au minimum de 12 mois voire, selon la discipline, de 18 mois.

En période d’entraînement et de compétition, une nourriture adaptée est recommandée, ainsi que des soins spécifiques comme l’entretien des coussinets. On veillera aussi à la bonne hydratation du chien avant, durant et après l’effort et on évitera de partir courir ou pédaler lorsque les températures sont trop élevées*****. Tous ces conseils sont bien évidemment valables pour un simple « loisir » de week-end. Car n’oublions pas que « qui veut voyager loin ménage sa monture »******.

Marie Perrin
 

Zoom sur l’Alaska


L’Iditarod Trail Sled Dog Race, mythique course hivernale, met chaque année depuis 1973 l’Alaska sous les feux de la rampe. Les attelages parcourent le territoire d’ouest en est sur 1800 kilomètres, reliant Anchorage à Nome en 8 ou 9 jours pour les plus performants. L’attelage en Alaska a une longue tradition : les aventuriers de la ruée vers l’or, les explorateurs et les mineurs du XIXe siècle utilisaient déjà des chiens pour leurs déplacements. 

Le plus grand Etat américain

Terre rugueuse et démesurée au climat rigoureux, l’Alaska fascine les êtres épris de solitude et de grands espaces vierges. Cet Etat américain, le plus étendu, bordé par l’océan Arctique au nord et la mer de Béring et l’océan Pacifique au sud, était jadis peuplé d’Inuits, d’Amérindiens et d’Aléoutes, mais le mode de vie traditionnel des autochtones a, ici comme ailleurs, été profondément bouleversé.

Une flore et une faune remarquables

L’Alaska abrite les plus grands parcs nationaux américains : montagnes, toundra, forêt tempérée humide, forêt boréale ou taïga se succèdent. Autant de paysages grandioses, faits de fjords, de volcans (en activité), de glaciers et de lacs, refuges d’une faune riche et variée. Ours blancs, grizzlys, élans, wapitis, phoques et saumons attirent ainsi nombre de touristes, en quête d’aventure et de sensations fortes.

Histoire et légendes

Découvrir l’Alaska, c’est aussi tourner les pages d’un livre d’histoire ou d’un récit de Jack London, entendre résonner le fracas de la ruée vers l’or du Klondike ou les charivaris des baleiniers britanniques et russes, se sentir devenir trappeur lorsque soudain, brisant le silence de la nuit polaire, s’élève le hurlement d’une meute de loups. C’est mettre ses pas dans ceux de Nicolas Vanier et rêver de se perdre dans l’immensité d’« Into the Wild ».



* A souligner : il n’existe pas de compétition de canirando. Cette discipline n’existe que sous sa forme « loisir ».
** Certaines personnes remplacent les skis par des patinettes (ou snowbles), qui sont des skis de petites tailles.
*** Ces « races » ne sont pas reconnues par la Fédération cynologique internationale et la sélection ne s’effectue pas sur des caractéristiques morphologiques mais sur l’aptitude au travail. Il n’y a donc pas de standard pour ces races, seules importent les capacités de travail, de vitesse et d’endurance.
**** Ainsi, en France, la Fédération française de pulka et traîneau à chiens – FFPTC.
***** Toutes les fédérations n’ont pas la même température de référence. Pour simplifier, on peut dire qu’au-delà de 20°Celsius, mieux vaut remettre la sortie à plus tard.
****** Jean Racine, in Les Plaideurs
Crédit photos : Marie Perrin et Empreinte 67

vendredi 15 mars 2013

Le chien-loup de Saarloos (Chien magazine de mars 2013)

A la croisée du chien et du loup : le Saarloos


Le chien-loup de Saarloos, race née aux Pays-Bas au XXe siècle, envoûte et fascine : son physique et ses attitudes de loup en font un chien à part, un primitif à fort tempérament qui s’apprivoise avec patience et s’éduque avec doigté*.

 
(Photo : Sandra Rémy Massoubre)
Il était une fois... le projet de Leendert Saarloos

Le chien-loup de Saarloos a vu le jour au XXe siècle, projet d’un Néerlandais, Leendert Saarloos, qui rêvait de créer une race de travail performante, particulièrement apte à servir l’être humain. Les premières hybridations entre un berger allemand, Gérard, et une louve de Russie, Fleur, datent des années 30. Son « chien-loup européen »,qu’il destinait par exemple au travail auprès des aveugles, fut reconnu par le Kennel Club hollandais en 1975, six ans après sa mort, et nommée en son hommage« chien-loup de Saarloos »**.

Ceux qui ont perpétué son oeuvre ont privilégié l’aspect lupoïde, délaissant le versant « travail », et peu à peu, les gènes de l’ancêtre Gérard se sont perdus dans les limbes de la sélection. Il en résulte, aujourd’hui, un chien rustique et résistant, physiquement et psychiquement très proche du loup, une race confidentielle réservée à quelques amateurs triés sur le volet, capables d’en appréhender toutes les spécificités.

Paroles de maîtres

« Il est mon autre », dit Fleur de son chien-loup. Comme elle, bien des maîtres forment avec ce frère de vie, ce compagnon spirituel un couple fusionnel, passionnel, quasiment originel. Eclat de loup dans des vies urbaines bien policées, l’expérience du Saarloos est un bouleversement qui bouscule toutes les certitudes : il y a un avant, et un après le Saarloos. « Ils nous font constamment nous remettre en question, nous font avancer vers le meilleur de nous-même », témoigne Sébastien, propriétaire de trois Saarloos, propos auxquels répond en écho une éleveuse française, Estelle : « Le propre du Saarloos ? La remise en question quasi permanente de soi-même ».


Les particularités du chien-loup de Saarloos


Le Saarloos tient parfois plus du félin que du canidé. Insoumis et têtu, il n’obéit que de sa propre volonté. Ce qui n’empêche pas certains propriétaires persévérants de pratiquer du canicross, de l’agility, de l’obédience, voire de les emmener comme chiens visiteurs dans les maisons de retraite. Mais cela n’est clairement pas la règle, bien plutôt l’exception.

Du loup, le Saarloos a hérité la réserve, la méfiance et l’instinct de fuite. Son besoin de contacts avec d’autres chiens est exacerbé : il ne s’épanouit pleinement qu’aux côtés de congénères et maîtrise à la perfection les arcanes du langage canin. Tout, chez lui, concourt à une communication optimale, de ses oreilles naturellement bien droites à sa queue et son museau longs.

Pour cette raison, la plupart des éleveurs exigent de leurs futurs adoptants qu’ils aient déjà au moins un chien, préférablement de sexe opposé. En effet, comme dans d’autres races primitives, la cohabitation de chiens du même sexe et sensiblement du même âge peut s’avérer conflictuelle, et chez les femelles, elle peut même tourner au bain de sang.

Du côté du comportement...

Sans verser dans les poncifs, et en rappelant que chaque individu, chaque lignée, chaque élevage sont différents, on peut lister quelques grands traits comportementaux comme l’émotivité, l’anxiété (laquelle peut être source de phobies), la tendance marquée à la destruction, un possible hyper-attachement et une grande difficulté à tolérer la solitude (avec les troubles et désagréments qui en découlent). Certains Saarloos sont particulièrement mordilleurs, d’autres apprécient de marquer leur environnement. Rétifs à la contrainte, souvent peu adaptables, ils sont surpris, voire effrayés par la nouveauté, et semblent se plaire dans une routine sécurisante. Silencieux, peu aboyeurs, ils laissent en revanche, tels des loups, s’élever leur chant dans l’opacité de la nuit.

Enfin, avec eux, rien n’est acquis a priori, tout se gagne : l’apprivoisement est parfois une étape nécessaire dans la relation à son chiot, à plus fort titre en cas d’adoption d’un adulte. De cette caractéristique découle ce qui peut s’apparenter à un casse-tête : comment les faire garder pendant les congés ? Certains ont résolu la question en ne partant jamais en vacances, d’autres en les transformant en Saarloos voyageurs.

Quelle vie et quelle éducation pour le Saarloos ?

Les éleveurs s’accordent généralement pour dire qu’un chien-loup de Saarloos est mieux à la campagne qu’à la ville, en maison qu’en appartement, avec un autre (grand) chien qu’avec un chat. Et que les poules ou les chèvres peuvent fort bien se retrouver au menu de ce prédateur-né, qui sait parfaitement comment survivre en pleine nature. En cas de défaut de socialisation, cette prédation peut d’ailleurs s’exercer sur des congénères de petites tailles.

Une éducation en douceur, reposant sur les méthodes positives et faisant appel à l’esprit d’initiative du chien, est l’unique moyen de gagner la confiance, l’affection et l’obéissance de son Saarloos. Une intense familiarisation, un détachement progressif et un apprentissage de la solitude sont par ailleurs des étapes nécessaires pour qui souhaite pouvoir emmener son compagnon partout, et s’absenter sans retrouver systématiquement son intérieur refait à neuf.

Marie Perrin
 


Néanmoins, le chien-loup de Saarloos n’est pas un primitif selon la classification de la FCI : il entre dans le groupe 1, celui des chiens de berger.
La Fédération cynologique internationale (FCI) a reconnu la race en 1981.